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    • 07 FÉV 22
    Allègement administratif obtenu auprès de la CNESST

    La FSSS-CSN fait le point sur ses interventions concernant les allègements administratifs et la notion de présomption administrative consentis aux travailleuses et travailleurs du réseau de la santé et des services sociaux par la CNESST.

    Nous croyons nécessaire à ce moment-ci de faire le point pour nous assurer de la bonne compréhension de toutes et tous et assurer que tous les travailleurs du réseau ne soient pas lésés par les manœuvres questionnables de certains employeurs.

    Allègement administratif obtenu auprès de la CNESST en 2020

    Pour la petite histoire, la Fédération, soutenue par la CSN, a obtenu à la fin du mois d’avril 2020, à la suite de plusieurs représentations auprès de la CNESST, un allègement administratif en faveur des travailleuses et des travailleurs de la santé ayant contracté la COVID-19. Grâce à cet allègement administratif, les réclamations déposées par les travailleurs de la santé ayant été en contact au travail à des cas de COVID-19 étaient acceptées par la CNESST sur présentation d’un résultat de test PCR positif au lieu d’une attestation médicale, sur la base qu’il était fort probable que l’infection ait été contractée au travail.

    Dès le départ, les travailleuses et travailleurs infectés ont rencontré des difficultés avec certains employeurs du réseau. Plusieurs « codaient » et payaient les travailleurs « COVID » dans le système de la paie, ceci ayant pour effet que les réclamations de la personne salariée n’étaient pas envoyées à la CNESST. Selon les données les plus récentes datant de plusieurs mois (juin 2021), plus de 45 000 travailleurs du réseau avaient reçu un test positif de la COVID, mais seulement 25 000 dossiers de réclamation avaient été ouverts à la CNESST. Et cela sans compter les cas d’infection liés au variant Omicron.

    L’importance d’avoir un dossier à la CNESST pour se protéger

    Ainsi, nous pouvons considérer que plusieurs milliers de travailleurs qui ont contracté la COVID au travail auraient dû avoir un dossier ouvert à la CNESST. Ne pas ouvrir de dossier à la CNESST peut créer un préjudice aux travailleurs s’il y a aggravation de la maladie, en cas de récidive et en cas de COVID longue. Nous vous rappelons qu’au niveau médical, la COVID demeure encore inconnue à bien des égards, et que le corps médical n’est pas en mesure encore de statuer, à ce moment-ci, sur les effets à long terme de la maladie, même si les personnes ayant contracté la maladie redeviennent négatives à la suite de la maladie. Beaucoup de recherches ont présentement cours à l’échelle mondiale à ce sujet.

    Pour la travailleuse ou le travailleur, le fait de ne pas avoir déposé, au moment opportun, une Réclamation du travailleur à la CNESST pourrait compromettre l’acceptation d’une réclamation future, dans l’éventualité où des symptômes apparaitraient.

    Lorsque l’employeur codifie un travailleur « COVID » et continue de le rémunérer sans utiliser sa banque de maladie, notamment pour les travailleurs à temps partiel ou les personnes à temps complet qui ont épuisé leur banque, cela peut sembler un avantage pécunier pour certains, car la personne continue à recevoir son salaire. Il est important de souligner ici que lorsqu’un travailleur dépose une Réclamation du travailleur à la CNESST, il est dans l’obligation de poursuivre sa rémunération les 14 premiers jours de sa lésion ou maladie et de faire parvenir une demande de remboursement à la CNESST.

    Par la suite, si la réclamation est acceptée, la CNESST versera l’indemnisation. Par conséquent, le travailleur continue d’être rémunéré à 90 % de son salaire et ne perd aucun droit. De plus, il est protégé en cas de récidive.

    Certains employeurs induisent les travailleuses et travailleurs en erreur

    Présentement, nous considérons que les employeurs, en codifiant les travailleurs « COVID » et en poursuivant leur rémunération ou en les référant en assurance salaire, court-circuitent l’allègement administratif consenti par la CNESST. Les travailleuses et travailleurs de la santé devaient pourtant en bénéficier, et sont mal informés sur leur droit de réclamer. En effet, il appartient aux travailleurs de déposer une réclamation à la CNESST puisqu’il s’agit d’un droit individuel. Cela dit, en vertu de la loi, l’employeur a l’obligation d’assister les travailleurs dans la rédaction de leurs réclamations. Donc, dans le cas où c’est un bureau de santé d’un employeur qui gère les réclamations, cela ne doit pas devenir le prétexte, pour l’employeur, de décider par lui-même, et au détriment des droits des travailleurs, si une réclamation doit être déposée ou non à la CNESST.

    Le tout a d’ailleurs été réitéré par le ministre du Travail lors d’une rencontre tenue le 4 février dernier. Un rappel à l’ordre doit d’ailleurs être fait aux employeurs du réseau à cet effet. Mais notre vigilance syndicale demeure de mise.

    En effet, durant les premières vagues, et de surcroit de façon marquée depuis la montée du variant Omicron, les employeurs continuent ce même stratagème, mais décident en plus, à la suite d’une enquête maison, si le travailleur a contracté ou non la COVID en milieu de travail.

    Il n’appartient pas à l’employeur de décider si oui ou non une réclamation doit être faite à la CNESST. L’employeur DOIT, par le biais d’une réclamation, ouvrir un dossier à la CNESST. C’est elle qui a la prérogative d’accepter ou de refuser. Si l’employeur n’est pas d’accord avec la décision, il peut contester la décision de la CNESST.

    Par ailleurs, les personnes n’ayant pas déposé de réclamation, alors qu’elles le pouvaient, peuvent le faire rétroactivement durant une période de 6 mois.

    Les démarches entreprises par la FSSS-CSN

    1- Mobilisation des syndicats

    Tout au long de la pandémie, lors des rencontres SST COVID avec les syndicats, nous avons été informés par les syndicats des difficultés rencontrées, et des campagnes d’information ont été déployées par les syndicats afin d’informer les travailleuses et travailleurs de leurs droits et de la façon de faire. La FSSS est intervenue à plusieurs reprises auprès de la CNESST afin qu’elle interpelle les employeurs au sujet des allègements consentis et qu’elle les rappelle à leurs obligations. Nous avons par ailleurs fait confirmer par la CNESST que les mesures d’allègement étaient toujours en vigueur. Ce qui est encore le cas.

    Lors des deux dernières rencontres SST-COVID, nous avons pu recueillir beaucoup d’information nous permettant d’affirmer que les employeurs induisent toujours les travailleurs en erreur. Les données ainsi recueillies nous ont grandement servi dans nos interventions auprès des autorités compétentes et aussi sur le plan médiatique.

    2- Demandes au MSSS

    Lors de la montée d’Omicron, nous avons fait des interventions auprès du MSSS afin qu’un rappel à l’ordre soit fait auprès des employeurs à l’effet de respecter les allègements consentis par la CNESST et de cesser leurs pratiques actuelles. Le MSSS a refusé de le faire.

    3- Canaux de communication CNESST/MSSS/ASSTSAS/INSPQ/IRSST/organisations syndicales

    À la demande de l’intersyndicale SST-COVID, nous avons interpellé la CNESST pour avoir une rencontre spécifique à ce sujet. La rencontre a eu lieu la semaine dernière et à la lumière de nos explications et des réponses des représentants du MSSS, la CNESST a indiqué clairement à la partie patronale que leur façon de faire était inadéquate et qu’il n’appartenait pas aux employeurs de décider si une réclamation de dossier devait ou non être déposée à la CNESST.

    La CNESST a exprimé qu’il lui appartenait de décider si oui ou non les réclamations étaient admissibles ou non. Si l’employeur était en désaccord avec la décision, il lui appartenait de contester. La CNESST a indiqué souhaiter rencontrer prochainement les représentants du MSSS à ce sujet.

    4- Les médias

    Nous sommes intervenus à plusieurs reprises à ce sujet dans les médias pour réclamer que le MSSS remette à l’ordre les employeurs voyous et nous avons fait une demande d’intervention auprès du ministre du Travail, lequel est responsable de l’application de la LATMP.

    5- Motion à l’Assemblée nationale

    Québec solidaire, interpellé par nos interventions dans les médias, a déposé une motion à l’Assemblée nationale, par l’entremise du député Alexandre Leduc :

    « Que l’Assemblée nationale exige du gouvernement que cessent les pratiques de gestion entretenant la confusion et qu’il clarifie que la présomption de contraction de la COVID au travail s’applique pour toutes les employées et tous les employés du réseau de la santé, comme c’était les cas lors des vagues précédentes de la pandémie de COVID-19;

    Que l’Assemblée nationale enjoigne au ministre de la Santé et des Services sociaux d’envoyer un signal clair en ce sens aux gestionnaires du réseau. »

    La motion a été rejetée par la CAQ.

    Enfin, la problématique décrite ci-haut dépasse le cadre des employeurs du secteur de la santé. Nous allons donc demander au ministre du Travail d’intervenir rapidement afin que la présomption administrative soit respectée dans le secteur de la santé, mais aussi afin qu’elle soit étendue aux secteurs privés de la Fédération. En effet, à l’heure actuelle, considérant les difficultés en matière de dépistage, en matière d’enquêtes épidémiologiques, et alors même qu’on procède à un déconfinement, nous estimons qu’il est important de faciliter le dépôt à l’acceptation de réclamations à la CNESST dans tous nos milieux de travail. Nous souhaitons aussi trouver une solution pour celles et ceux qui ont été privés de ce droit depuis le début de la pandémie.

    Judith Huot, vice-présidente de la FSSS-CSN