Le ministre des Finances de la Coalition avenir Québec (CAQ), Eric Girard, a déposé un budget austère dans lequel, par manque de vision, il refuse d’imposer le traitement choc nécessaire pour mettre fin aux crises qui secouent durement le réseau public de la santé et des services sociaux. Le filet social continuera de s’effriter, déplore la Fédération de la santé et des services sociaux (FSSS-CSN), la plus grande organisation syndicale en santé et services sociaux.
«Austère, la CAQ limite la hausse du financement du réseau public de la santé et des services sociaux en deçà de ce qui est nécessaire pour maintenir les services à la population québécoise», fait remarquer Réjean Leclerc, président de la FSSS-CSN. «En plus, il passe à côté des solutions connues et efficaces afin de requinquer le réseau public bien amoché.»
«Réseau de la santé mal en point, logement, aide aux femmes et enfants victimes de violence conjugale, itinérance, insécurité alimentaire, soutien aux jeunes en difficulté, santé mentale, manque de places dans les CPE, hébergement des aînés, soins à domicile, secteur ambulancier… La liste des crises qui font régulièrement la manchette est longue», observe Réjean Leclerc.
Austérité ?
La FSSS-CSN en appelle à une large réflexion nationale sur les revenus de l’État, la fiscalité des grandes entreprises, les subventions aux riches corporations, l’évitement fiscal, une taxe sur le patrimoine des 1% les plus fortunés. Voilà certaines mesures parmi les nombreuses qui permettraient d’accroître les revenus de l’État et d’offrir les services auxquels les citoyennes et les citoyens sont en droit de s’attendre. Tout en favorisant le filet social, qui fait la fierté de la population québécoise.
«Le ministre des Finances annonce plutôt une révision des dépenses, ce qui pourrait ouvrir la porte à une nouvelle ère d’austérité libérale à la sauce caquiste», critique Réjean Leclerc.
Privatisation
Le gouvernement aurait pu dégager des sommes importantes en déprivatisant le réseau de la santé et des services sociaux. La première ligne est contrôlée par les médecins entrepreneurs, la marchandisation des soins aux personnes en perte d’autonomie est dispendieuse, les cliniques privées lucratives reçoivent de l’argent public pour dégager des profits, etc. Il y a place aux économies.
De grands besoins
Les besoins sont nombreux en santé et services sociaux. Parmi ceux identifiés par la FSSS-CSN :
- Accroissement du budget des établissements publics au-delà des «coûts de système»;
- Réinvestir dans les soins à domicile publics et les soins de santé communautaires, une priorité pour la population;
- Augmenter les investissements dans la prévention de la maladie;
- Hausse du financement des organismes communautaires autonomes qui bouchent tant bien que mal les trous dans le filet social;
- Accroître les budgets dédiés au secteur préhospitalier afin d’augmenter le nombre de paramédics sur la route, en phase avec l’idée de désengorger les urgences et la première ligne. Également, accroître leur autonomie afin de rendre la profession attractive;
- Financer adéquatement le réseau public pour l’hébergement digne des personnes âgées qui ne peuvent demeurer à la maison;
- Accélérer le développement du réseau des CPE;
- Soutenir les familles d’accueil qui reçoivent des jeunes de la DPJ ou des adultes vivant avec une déficience intellectuelle et physique.
Conditions de travail dans le réseau
Judith Huot, première vice-présidente de la FSSS-CSN, désapprouve particulièrement que la CAQ fasse porter son déficit record de 11 milliards $ en bonne partie sur les épaules des travailleuses et travailleurs, sur la hausse de leur rémunération. «Le ministre Girard a-t-il déjà oublié que les conditions d’emploi peu attractives dans le réseau public, composé à très grande majorité de femmes, ont engendré une difficile pénurie de main-d’œuvre au cours des dernières années?»
Hébergement pour femmes et enfants victimes de violence
Lucie Longchamp, aussi vice-présidente FSSS-CSN, est déçue du peu d’investissement dans les secteurs qu’elle représente : préhospitalier, services de garde éducatifs, RPA, hébergement pour jeunes et adultes… Particulièrement par le sous-financement des organismes pour femmes et enfants victimes de violence conjugale, dont les difficultés ont fait la manchette récemment.
«C’est un non-sens, avec la hausse des féminicides, qu’on ne finance pas correctement et de manière pérenne ces ressources essentielles», lance Lucie Longchamp. «Qu’est-ce qu’on attend ? Pour la FSSS-CSN, il ne peut y en avoir une de plus.»