L’enjeu de l’organisation du travail a toujours été au cœur de nos priorités. Nous avons sans cesse voulu faire partie de la solution quand vient le temps de réfléchir à des propositions pour améliorer les conditions de travail du personnel du réseau de la santé et des services sociaux. Par contre, force est de constater que nous avons fait face à beaucoup de mauvaise foi sur cette question, aussi bien de la part de plusieurs employeurs que des gouvernements. Que faire devant autant de vœux pieux?
Parler des deux côtés de la bouche sur l’organisation du travail
Nous avons été des plus actifs dans les travaux d’organisation du travail dans les dernières années. Nous avons milité pour que ces travaux se fassent de façon paritaire et pour qu’ils aient pour objectif à la fois d’améliorer les services aux usagères et usagers et d’améliorer nos conditions de travail.
Comment expliquer que les intentions des gouvernements soient souvent restées des vœux pieux? Les gouvernements prétendent vouloir placer le patient au cœur des réformes de l’organisation du travail. Pourtant, ils continuent de faire subir des salves répétées de compressions budgétaires au réseau de la santé et des services sociaux. Comment peut-on vraiment penser améliorer l’organisation du travail sans y mettre les efforts nécessaires? Si l’on veut instaurer des changements positifs, il faut prendre le temps et mettre les ressources nécessaires pour y arriver. Jusqu’à maintenant, force est de constater que tout cela reste des vœux pieux.
On ne peut faire croire à la population que l’on parviendra à améliorer l’accès aux services si on continue en même temps de couper dans les budgets. Ce n’est certainement pas en abolissant des postes et en augmentant notre charge de travail qu’on réussira à mieux soigner la population.
Des vœux pieux qui cachent un préjugé favorable pour la privatisation
Qu’arrivera-t-il si on ne réussit pas à améliorer l’accès aux services dans les prochaines années? De plus en plus de patient-es se tourneront alors vers le privé. C’est déjà le cas depuis quelques années, notamment pour certaines chirurgies pour lesquelles le gouvernement Charest avait permis le recours au privé et la couverture par des assurances privées.
À force de couper dans les budgets et de ne pas mettre en place les solutions qui s’imposent, le gouvernement joue la carte de la privatisation. Quand il n’ouvre pas directement la voie au privé, il s’efforce d’affaiblir le réseau public, ce qui aura indirectement le même effet.
C’est donc que derrière les vœux pieux sur l’organisation du travail se cache une idéologie en faveur de la privatisation. Si elle s’affiche de moins en moins, c’est parce qu’elle ne convainc plus. En effet, les études démontrent que le privé en santé n’est pas la solution, qu’il nous en coûterait plus cher pour une qualité moindre. Si les gouvernements veulent continuer de favoriser le privé, ils sont de plus en plus forcés de le faire en affaiblissant progressivement le réseau public.
C’est d’ailleurs ce que vise à faire le projet de loi 10 du ministre Barrette. En effet, pourquoi se lancer dans une énième réforme de structure alors que les problèmes vécus par la population sont sur l’enjeu de l’accès aux services?
On commence déjà à voir les réels effets de cette réforme. Depuis quelques semaines, le réseau est plus affaibli que jamais. On annonce des milliers d’abolitions de postes. Le réseau perdra ainsi une expertise publique sans prix. Plusieurs des personnes qui quitteront le réseau public se retrouveront sans doute dans le privé, à attendre les patient-es qui en auront assez d’attendre dans les urgences…
Des solutions pour l’avenir de notre réseau public
Pourtant, des solutions existent. Voilà plusieurs années que la FSSS-CSN joue un rôle de premier plan pour améliorer l’organisation du travail.
Nous avons participé à établir les principes sur lesquels tout projet d’organisation du travail devrait reposer. Nous avons fait partie de plusieurs projets afin de mettre de l’avant des solutions pour les usagères et usagers. À certains endroits, lorsque toutes les composantes étaient prêtes à travailler dans le même sens, cela a permis d’améliorer sensiblement les services à la population.
Des exemples? Au CSSS de la Vieille-Capitale, un projet a permis d’augmenter de 6 % le nombre d’interventions à domicile. Au CHU Sainte-Justine, le taux de report des chirurgies aux soins intensifs, par manque de lits disponibles, a diminué de 33 % en 2007-2008 à 15 % en 2010-2011.
Nous avons aussi travaillé avec l’ensemble des composantes du réseau pour mettre de l’avant des solutions pour l’avenir de notre réseau public.
Avec le temps, le gouvernement est de plus en plus isolé avec son appui invétéré au privé. Nous devons continuer à travailler avec le plus de partenaires possible pour trouver des solutions d’avenir. Nous devons continuer de nous mobiliser pour notre réseau public de santé et de services sociaux!
Nadine Lambert