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    • 17 AVR 15
    Gouverner avec 2 poids, 2 mesures

    Je prévoyais faire mon blogue cette semaine sur la sortie de Martin Coiteux qui balaie du revers de la main les critiques sur l’augmentation salariale incroyable octroyée aux dirigeant-es de la Caisse de dépôt du Québec. Sans broncher, il a affirmé que c’était les conditions du marché qui dictait cette augmentation. Le lendemain, son collègue de la santé et des services sociaux justifiait l’augmentation de 20 % du directeur du CUSM, indiquant que l’augmentation de ces responsabilités justifiait cette augmentation importante.

    Finalement, je vais faire deux billets de blogue sur la question de gouverner avec deux poids – deux mesures!

    L’hygiène des aîné-es dans les CHSLD

    Déjà mercredi soir, je voyais venir la mise en scène concernant les préposé-es aux bénéficiaires qui offrent leurs services après les heures de travail pour que les bénéficiaires puissent avoir accès à plus qu’un bain par semaine. Je dis bien mise en scène, parce que la ligne que le gouvernement veut qu’on retienne est d’abord qu’il s’agit de « travail au noir » et ensuite que ces préposé-es se retrouveraient dans un « conflit d’intérêts ». Ce que le gouvernement ne veut pas qu’on retienne, c’est qu’il  pense qu’un bain par semaine dans un CHSLD est suffisant!

    Commençons donc par le travail au noir. La plupart du monde va convenir rapidement que ce n’est pas une bonne idée de faire du travail non déclaré au fisc. D’ailleurs, le ministre, comme la CAQ la veille, sans aucune enquête et sans aucune preuve affirme que c’est du travail non déclaré. Si la préposée aux bénéficiaires déclare ses revenus au fisc, elle ne travaille pas « au noir ». Ce serait donc tout à fait légal! Cependant, même en déclarant ses revenus, une préposée aux bénéficiaires ne devrait pas accepter de prendre un tel contrat. Qu’arriverait-il si elle se blessait ou que le bénéficiaire se blessait? Les risques encourus par ces travailleuses et travailleurs ne valent pas les quelques dollars que la préposée aux bénéficiaires va ramasser, qu’elle déclare ou non ses revenus.

    En écoutant le ministre à Radio Canada, j’étais bleu marin. En moins de 24 heures après avoir appris qu’il y a des préposé-es aux bénéficiaires qui donnent des bains à l’extérieur de leurs heures de travail, le ministre dit avec beaucoup de conviction que la pratique est terminée. Le jour même, le ministre envoie une directive ministérielle pour que les préposé-es cessent immédiatement de faire ce travail parce qu’elles sont, entre autres, en conflit d’intérêts. Notre ministre est pas mal bon, n’est-ce pas? En moins de 24 heures, il a mis ses culottes et il va arrêter les préposé-es!

    J’ai hâte de voir la directive en question. Est-ce que le ministre va avoir le courage de rappeler tout le monde à l’ordre? Est-ce que le ministre va rappeler à l’ordre les médecins spécialistes, par exemple certains radiologistes, qui disent à un patient qu’ils voient dans l’hôpital qu’il peut attendre de 6 mois à 1 an dans le secteur public pour une intervention qui est plutôt urgente, ou qu’il peut venir voir ce même radiologiste dans sa clinique privée à quelques rues de l’hôpital pour une intervention dans quelques semaines?

    S’il ne rappelle pas tout le monde à l’ordre quant à l’ouverture au privé, c’est donc qu’on n’assiste pas à du courage de la part du ministre, mais bien à de l’hypocrisie pure et simple.

    Le vrai scandale!

    Mais le vrai scandale dans l’entrevue que j’ai entendu avec le ministre, c’est lorsqu’il a dit que de donner un bain par semaine est correct. Même en expliquant les autres procédures qui remplacent le bain pendant le reste de la semaine, la position du ministre Barrette est de la foutaise! Toutes les autres mesures prises dans nos établissements ne remplacent pas un bain, point à la ligne. Qui accepterait de n’avoir qu’un seul bain par semaine?

    Le ministre a expliqué le fond de sa pensée. Si une personne dans un CHSLD veut plus de services, elle n’a qu’à interpeller le privé pour lui en donner. Lorsqu’on sait que les personnes ainées se retrouvent de façon disproportionnée dans le 20 % de la population le plus pauvre, on sait qu’elles n’ont pas les moyens de payer 20, 30, ou 40 $ de plus pour avoir quelques bains de plus par semaine. C’est ça le vrai scandale et le sujet qui devrait nous préoccuper, mais de cela, le ministre s’en sacre! Il faut équilibrer le budget, en réduisant les dépenses. Le reste n’a pas d’importance!

    La semaine prochaine, je vais revenir sur le traitement que ce gouvernement réserve pour les mieux nantis, en espérant m’être calmé sur les propos indignes du ministre.

    Jeff Begley