L’Hôtel-Dieu de Montréal à vendre pour faire des condos ?
(Montréal, le 17 mai 2013). Montréal fête aujourd’hui son 371e anniversaire de fondation. Le Syndicat des employé-es du CHUM–CSN aimerait d’autant plus célébrer cette fête qu’on reconnaît dorénavant officiellement le rôle joué par Jeanne-Mance dans la fondation de la Métropole. Toutefois, les réjouissances sont assombries par la vente annoncée du principal legs de Jeanne-Mance, soit l’Hôtel-Dieu de Montréal, premier hôpital en Amérique du Nord. Voilà pourquoi des syndiqué-es ont manifesté ce midi devant l’établissement pour dénoncer cette perte inestimable qu’est l’Hôtel-Dieu.
« L’Hôtel-Dieu a bénéficié d’investissements de près de 50 millions de dollars ces dernières années pour moderniser les installations en cardiologie, dans les soins intensifs, l’urgence, l’hémodynamie, l’angioplastie et les grands brûlés, fait valoir Jean Lacharité, vice-président de la Confédération de syndicats nationaux. Il y a moins de deux ans, l’administration vantait certaines de nos salles d’opérations comme étant les plus perfectionnées en Amérique du Nord. Aujourd’hui, on parle de vendre cet hôpital pour en faire des condos! Fermer l’Hôtel-Dieu, c’est aussi perdre l’un des seuls établissements francophones à l’ouest du boulevard Saint-Laurent. C’est un gaspillage de fonds publics. Le centre-ville y perdra 175 lits et une urgence. On investit collectivement plus de 2 milliards dans le PPP du CHUM pour en arriver à moins d’accessibilité pour la population : c’est quand même incroyable. »
Le CHUM actuel n’utilise pas tous les lits autorisés par le ministère de la Santé et des Services sociaux et le futur CHUM comportera 187 lits de moins qu’actuellement. Ces lits en moins correspondent à ceux qui existent présentement à l’Hôtel-Dieu.
Manque criant de lits à Montréal
Les médecins, les dentistes et les pharmaciens du CHUM ont déjà fait valoir, en 2011, que les listes d’attente pour des chirurgies comptaient jusqu’à 9000 patients en raison du manque de lits. Le problème est aggravé du fait que de plusieurs d’entre eux sont occupés par des bénéficiaires âgés qui devraient être pris en charge par les CHSLD, mais qui en sont incapables, faute de ressources. Cette situation se répercute aussi sur la capacité du réseau hospitalier à traiter les patients de manière convenable et dans des délais acceptables. Ainsi, le taux d’hospitalisation a Montréal a chuté de plus de 40 %, passant de 300 000 patients en 1994-1995 à 214 000 en 2008-2009, une baisse qui s’explique notamment par la fermeture d’une dizaine d’hôpitaux ces dernières années.
« Avec 1,7 lit pour 1000 habitants, la région montréalaise ne peut clairement pas répondre à la demande. La moyenne de lits par habitant dans tous les autres pays d’Occident est carrément le double, soit 3,4 lits par 1000 habitants. Montréal était d’ailleurs près de cette moyenne au milieu des années 90. Des 28 pays de l’OCDE, seul le Mexique compte aujourd’hui moins de lits par habitant que le Canada et Montréal. « Ce n’est pas normal, souligne le vice-président de la Fédération de la santé et des services sociaux (FSSS–CSN) pour la région de Montréal et de Laval, Luc Bastien. Nous sommes d’avis que la région montréalaise a besoin de l’Hôtel-Dieu pour répondre à la demande pour plusieurs types de soins. Le CHUM ultra-spécialisé ne sera d’aucun secours pour faire diminuer les listes d’attente. Dans son édition du 8 mai dernier, le quotidien La Presse faisait d’ailleurs état de temps d’attente problématiques dans les trois établissements du CHUM. Ce n’est certainement pas en fermant des lits qu’on améliorera la situation ! »
La fermeture de l’Hôtel-Dieu : un manque de vision
Pour le président du Conseil central du Montréal métropolitain, Gaétan Châteauneuf, cette décision manque de vision et il se demande ce que la Ville de Montréal en pense : « On ferme ici un établissement patrimonial qui recevait 50 000 visites par année. C’est une perte de services pour la population et cela a aussi un coût économique. On aura beau en faire des condos splendides, pour les commerçants du coin la perte de cet établissement entraînerait également une perte de clientèle. De plus, on réduit encore l’attrait de ce secteur de la ville pour les jeunes familles en leur disant que dorénavant, il n’y aura plus d’urgence à proximité. Il faudra attendre encore plus longtemps, et se rendre à Notre-Dame. »
De son côté, le président du Syndicat des employé-es du CHUM, Pierre Daoust dénonce le flou entourant la vente des installations de l’Hôtel-Dieu. « Nos gestionnaires, qu’il s’agisse des établissements ou de l’Agence régionale de la santé et des services sociaux semblent improviser dans un grand jeu de Monopoly. Il ne sont pas là pour faire du profit en se départissant d’édifices patrimoniaux. Leur job est d’assurer la santé publique, en toute transparence. L’Hôtel-Dieu, grâce au dévouement de ses employé-es, s’est forgé une solide réputation dans des secteurs de pointe comme l’hémodynamie et la médecine nucléaire. Nous souhaitons avoir des explications précises sur ce que comptent faire l’administration du CHUM et l’agence pour pallier le manque de lits dans la région de Montréal alors qu’une bonne partie de la solution existe déjà, ici même, à l’Hôtel-Dieu. »
À propos
Le SECHUM–CSN représente quelque 5000 travailleuses et travailleurs du CHUM notamment aux établissements actuellement connus sous les noms de Notre-Dame, Saint-Luc et Hôtel-Dieu. Il est affilié à la Fédération de la santé et des services sociaux (FSSS–CSN), au Conseil central du Montréal métropolitain (CCMM–CSN) ainsi qu’à la Confédération des syndicats nationaux. Fondée en 1921, la CSN regroupe aujourd’hui quelque 300 000 salarié-es de tous les secteurs d’activité.
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Pour information :
François Forget, CSN–Communications : 514 212-7383