On a beaucoup parlé cette semaine des primes salariales que l’ancien ministre de la Santé et des Services sociaux, Yves Bolduc, a obtenues alors qu’il pratiquait la médecine lors de son passage dans l’opposition. Pendant qu’une minorité va chercher des salaires de plus de 400 000 $ à partir des fonds publics, l’ensemble de nos membres doit plutôt subir un appauvrissement depuis les 30 dernières années. C’est deux poids, deux mesures!
L’affaire Bolduc
Ce qu’on reproche au ministre Bolduc, c’est d’avoir donné le minimum de services en réclamant le maximum de salaires auprès de la RAMQ. Pendant son passage dans l’opposition, il a suivi des patients et patientes comme médecin de famille en plus de son travail de député. Le fait que le ministre Bolduc ait obtenu des primes salariales pour traiter environ 1500 patients en profitant d’une entente avec la RAMQ, qu’il a lui-même entérinée alors qu’il était ministre de la Santé, pose de nombreuses questions.
Cela pose évidemment des questions éthiques, comme l’a souligné l’ancien ministre de la Santé Claude Castonguay. Mais ce que toute cette histoire démontre, c’est qu’une minorité de personnes bien influentes n’hésite pas une seconde quand vient le temps de piger dans les fonds publics. Ce sont souvent les mêmes qui crient au meurtre quand le personnel du secteur public demande un rattrapage salarial. Ces grands privilégiés font valoir que non seulement ils méritent ces avantages, mais qu’en plus nous devrions les remercier pour leur dévouement exemplaire.
Et pourquoi devrions-nous être si reconnaissants? Parce qu’aux dires du ministre actuel de la Santé et des services sociaux, Gaétan Barrette, les primes obtenues par monsieur Bolduc sont justifiées puisqu’il a « travaillé très fort ». Il va même plus loin en déclarant que « le Québec est un endroit très particulier dans le monde parce qu’apparemment travailler très fort est quelque chose de répréhensible ».
Monsieur Barrette, le problème n’est pas de travailler très fort, mais bien que seuls les efforts d’une minorité soit récompensés.
À quel moment nous avons vous vu, rempli d’empathie, saluer le travail acharné du personnel du secteur public?
Les infirmières qui doivent faire du temps supplémentaire obligatoire parce que nos décideurs laissent traîner en longueur la pénurie de personnel, ne travaillent-elles pas fort? Les préposées aux bénéficiaires qui interviennent auprès d’usagères et d’usagers aux profils de plus en plus complexes, ne travaillent-elles pas fort? Les professionnels qui voient le nombre de leur patients augmenter sans cesse au nom de l’optimisation, ne travaillent-ils pas fort?
Travailler fort et s’appauvrir
Demandez à n’importe quel travailleuse ou travailleur du réseau de la santé et des services sociaux et il vous expliquera que sa charge de travail a augmenté considérablement dans les dernières années. Il vous témoignera aussi de l’impact des compressions et des multiples restructurations sur la qualité des soins donnés à la population.
C’est que la pression au travail n’a fait qu’augmenter dans les dernières années. Abolition de postes, hausse du temps supplémentaire, augmentation du roulement de personnel, les causes sont multiples, mais ont toutes pour conséquence de rendre le quotidien de milliers d’intervenants de plus en plus difficile.
Pendant qu’on demande sans cesse au personnel du secteur public de faire plus avec moins, on leur demande en plus d’accepter de s’appauvrir lentement. C’est que les hausses salariales des dernières années n’ont même pas permis de couvrir la hausse du coût de la vie. Et malgré cette triste réalité, on continue de prétendre que nous sommes des « gras dur »! Pourtant, pendant que le personnel du secteur public s’appauvrit, une minorité de privilégiés s’enrichit sans que le regard ne se pointe vers eux…
Mais dites-moi, Messieurs Bolduc et Barrette, seriez-vous prêts à abandonner vos privilèges et à devenir infirmier, préposé ou professionnel dans le réseau de la santé et des services sociaux?
Après tout, vous avez tout ce qu’il faut, puisque vous travaillez si fort!