La FSSS, comme la très grande majorité des organisations qui sont entendues en commission parlementaire, s’oppose au projet de loi 10 du ministre Barrette. Ce projet de loi aura pour conséquence de complètement désorganiser le réseau de la santé et des services sociaux. Un des effets qu’aura cette réforme de structures sera de diminuer la place des services sociaux dans le réseau.
Une nouvelle attaque aux services sociaux
Les services sociaux sont la cible de nos gouvernements depuis plusieurs années. Pensons par exemple aux fusions de 2004 mises de l’avant par l’ancien ministre de la Santé et des Services sociaux, Philippe Couillard. En créant les CSSS, ces fusions ont eu pour effet de concentrer les énergies et les budgets dans les hôpitaux. Ce sont les services sociaux (CLSC, centres de réadaptation, centres jeunesse) qui en ont fait les frais.
Est-ce que le projet de loi 10 accentuera cette tendance à l’hospitalocentrisme contre les services sociaux ?
Pour en juger, il appert de se rappeler les principaux objectifs de la loi en vigueur au Québec qui font toujours actuellement l’objet d’un large consensus auprès de la population québécoise :
« La loi sur les services de santé et de services sociaux a pour but le maintien et l’amélioration de la capacité physique, psychique et sociale des personnes d’agir dans leur milieu et d’accomplir les rôles qu’elles entendent assumer d’une manière acceptable pour elles-mêmes et pour les groupes dont elles font partie. »
Parmi les objectifs détaillés qui s’en suivent, deux de ceux-ci concernent plus précisément les services sociaux, soit :
- Favoriser l’adaptation ou la réadaptation des personnes, leur intégration ou leur réintégration sociale;
- Diminuer l’impact des problèmes qui compromettent l’équilibre, l’épanouissement et l’autonomie des personnes;
Les budgets alloués du ministère pour respecter les obligations de cette loi envers les citoyennes et citoyens sont dirigés principalement vers les CLSC, les centres de réadaptation (physique et en déficience intellectuelle), les centres jeunesse et les organismes communautaires. Ceux-ci ont tous développé au fil des années des expertises dans leur secteur respectif, et ce, malgré l’impact des fusions de 2004.
Dans le projet de loi 10 du ministre Barrette, les missions des centres jeunesse et des CRDI seront intégrées dans les CISSS. Ils rejoindront ainsi les CLSC qui sont inclus dans les CSSS depuis 10 ans maintenant. L’ensemble des missions de santé et de services sociaux se retrouvera dans une seule structure. L’histoire devrait nous inspirer sur les risques d’un pareil projet.
En effet, l’expérience des CLSC devrait servir d’exemple au ministre. Plusieurs études démontrent que plus un établissement est immense, plus les difficultés de gestion qu’il entraîne avec lui sont énormes et plus les coûts qui y sont associés augmentent. Le cas des CLSC en est un très bon exemple. Depuis la création des CSSS il y a 10 ans, nous avons assisté à un recul de la première ligne. Quand est venu le temps de faire des compressions, ce sont les CLSC et les CHSLD qui ont été les premiers touchés. Pendant ce temps, les activités se concentrent de plus en plus dans les hôpitaux et les temps d’attente aux urgences s’allongent…
Un projet de loi qui ne répond pas aux besoins de la population
Dans un tel contexte, il devient presque impossible de demeurer en contact avec les besoins des populations vulnérables qui ont besoin des services sociaux. Dès lors, la priorité des budgets est allouée aux services médicaux de l’hôpital. Il faut ajouter à cela le lobby des groupes de médecins qui ont plus de poids auprès du gouvernement que les populations vulnérables.
La menace de ne pas allouer les sommes pour des services sociaux adéquats est donc bien réelle. C’est d’autant plus le cas que la LSSSS prévoit que les services doivent être donnés compte tenu des ressources.
Lorsque les budgets sont engouffrés dans des mégas-hôpitaux et que le gouvernement n’a pas d’obligation (en vertu de la LSSS), de garantir des ressources aux plus vulnérables dans votre communauté, la réponse qui vous sera donnée est celle-ci : « Il n’y a plus de service au numéro que vous avez composé ».
Nous devons donc non seulement poursuivre la lutte contre ce projet de loi, mais aussi nous en prendre au démantèlement des services sociaux. Les compressions que subit sans cesse le réseau ne font que diminuer la portée de ces services qui permettent de diminuer les inégalités sociales.