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    • 15 MAR 19
    Opposer notre détermination à la violence systémique

    La semaine dernière, la journée internationale des droits des femmes a été soulignée sous le thème Le respect ça ce manifeste ! Une journée à discuter, débattre, marcher et manifester contre l’oppression toujours présente et manifestement croissante depuis quelques années.

    Des luttes à poursuivre face à la montée de la droite extrême

    L’histoire récente des luttes féministes au Québec nous démontre que certaines luttes ont porté fruit. Nous n’avons qu’à prendre par exemple la création des CPE, la loi sur l’équité salariale ou plus récemment la loi sur le régime québécois d’assurance parentale. Ces luttes victorieuses ont participé à l’émancipation des femmes.

    Malheureusement, avec la montée du nationalisme et de la droite extrême partout dans le monde, les inégalités et la discrimination envers les femmes augmentent, laissant place à un discours misogyne décomplexé. On n’a qu’à penser aux nombreuses déclarations de Donald Trump pour s’en convaincre.

    Le Québec n’y échappe pas. Sur le plan économique, les gouvernements qui se sont succédé depuis plus de 20 ans n’ont eu que l’équilibre budgétaire et les mesures d’austérité en tête. Cela a fait mal au budget des familles des travailleuses et travailleurs et la situation économique des femmes québécoises s’est précarisée.

    En plus de vivre de plus en plus de précarité économique, plusieurs femmes font face à des conditions de travail toxiques. Ce cocktail néfaste nuit à leur émancipation et leur autonomie.

    Une violence systémique croissante

    Nous entendons de plus en plus parler de violence systémique et structurelle. Ce phénomène n’est pas récent, mais fait partie depuis peu du discours ambiant depuis notamment la réforme Barrette dans les services de santé et de services sociaux.

    La « violence systémique » réfère à la « violence produite par l’organisation du travail », et signifie que la structure de l’organisation peut avoir des caractéristiques qui rendent les travailleuses et travailleurs susceptibles de vivre ou de commettre de la violence.

    Le terme « violence structurelle » est employé pour identifier la charge de travail élevée, le faible degré d’autonomie décisionnelle au travail, le faible statut hiérarchique, les procédures de travail rigides et le faible soutien relationnel, comme des formes de violence au travail. Une étude canadienne menée auprès de travailleuses et travailleurs du domaine de la santé montre que ces conditions de travail sont non seulement néfastes pour la santé physique et psychologique du personnel, mais elles limiteraient aussi la capacité des travailleuses à fournir la qualité des soins qu’ils savent qu’ils sont capables de fournir.

    Je suis certaine que ces termes de violence systémique et structurelle reflètent bien le quotidien de plusieurs travailleuses et travailleurs. Un sondage réalisé par l’équipe VISAGE démontre que 81 % du personnel soignant sont victimes ou témoins d’une forme de violence au travail. Nous avions d’ailleurs dénoncé cette situation dans un reportage. Nous pouvons affirmer que les travailleuses du réseau vivent ces violences de façon quotidienne. Nous pouvons affirmer que les travailleuses du réseau ont perdu le sens au travail. L’augmentation fulgurante des travailleuses en assurances salaire, l’exode de celles-ci vers d’autres milieux de travail plus sains en dit long.

    Une fois ces constats faits, que faisons-nous ? Comment fait-on pour s’en sortir ?

    Le respect, ça se manifeste !

    Nous avons présentement le momentum idéal pour exiger ce respect. À travers les sondages que nous avons faits auprès des travailleuses et travailleurs du réseau de la santé et des services sociaux, il est clair que la surcharge a atteint des sommets.

    Nos nombreuses interventions partout au Québec ont permis d’illustrer l’ampleur du problème. On peut maintenant dire que l’opinion publique nous est favorable.

    En plus, les coffres de l’État sont remplis en raison de l’austérité qu’on nous a fait subir. Il est temps qu’on manifeste le droit à des conditions de travail décentes et exemptes de toute forme de violence.

    C’est possible ! Nos camarades des CPE en ont fait la démonstration. Des assemblées générales de centaines de femmes, prêtes à lutter, à se tenir debout et déterminées à se faire respecter. Oui elles ont dû faire la grève, oui cela a été difficile, mais elles ont réussi à avancer ! C’est aussi ce qui est en train d’arriver dans le réseau, avec la fin du TSO dans certaines régions et des employeurs qui sont de plus en plus forcés d’agir pour améliorer les choses en raison de nos actions.

    Comment on améliore les choses ? On en parle, on s’implique, on s’invite dans les lieux décisionnels, dans le discours politique. On dit non, on lève le poing, on sort dans la rue, on réclame, on demande, ON EXIGE !

    On utilise notre colère, notre combativité, notre ténacité.

    On s’organise, on se solidarise, ON RÉSISTE !

    Le respect, ça se manifeste !

    Judith Huot