Au fil des dernières années, vous avez été à même de constater que les contrôles administratifs de type « statistique » ont augmenté de façon significative dans notre travail. Les services de santé et de services sociaux se sont vus investis par des comptables qui gèrent les établissements comme des entreprises privées. Pour eux, c’est comme s’il s’agissait uniquement de surveiller la rentabilité et la productivité.
Une autonomie bafouée et une perte de sens du travail
Il s’en est suivi une grande perte de sens au travail pour plusieurs travailleuses et travailleurs du réseau. Cette dévalorisation ne fut pas sans conséquence. On remarque par exemple que le taux d’absentéisme augmente, que le taux d’assurance-salaire est très élevé dans le réseau et que le taux de roulement augmente considérablement.
Pour la plupart d’entre vous, les professions que vous avez choisies devaient vous permettre de vous investir auprès d’êtres humains pour donner des soins ou des services de qualité. Les qualifications qui sont requises pour obtenir vos emplois exigent de vous que vous fassiez preuve de connaissances académiques suffisantes ainsi que d’un jugement professionnel pour les exercer. Ces compétences devraient vous permettre de prodiguer les meilleurs soins et services. C’est d’autant plus le cas que l’on observe un alourdissement des cas vécus par plusieurs usagères et usagers, notamment au niveau de la santé mentale et des troubles graves du comportement.
En effet, que ce soit au niveau des services en enfance, en déficience intellectuelle ou auprès des personnes âgées, on observe une augmentation des troubles de santé mentale et des troubles graves du comportement. Les travailleuses et travailleurs sont donc exposés à plus de complexité au niveau des problématiques, sans que l’on ne fasse confiance à leur jugement professionnel.
On observe plutôt une trop grande standardisation des pratiques. Face à la complexification des réalités, nous devrions plutôt faire confiance au personnel et miser sur l’autonomie professionnelle.
Nos gouvernants ont plutôt choisi d’introduire le principe du minutage dans notre pratique, ce qui entraîne des conséquences lourdes de conséquences. Cela vous empêchera par exemple de développer un plan de soins et de services qui serait le plus adapté possible pour chaque usager.
Vous assistez donc à une déshumanisation des services que nous donnons dans nos établissements. Cela a des impacts majeurs pour la population, mais aussi pour le personnel. Plusieurs terminent chaque fin de journée de travail avec le sentiment de ne pas avoir accompli professionnellement ce qui aurait dû être fait pour le bien de l’usager.
Pour un autre modèle de gestion et une reconnaissance de notre autonomie
C’est pour s’opposer à cette vision étroite de la gestion que la FSSS est intervenue à plusieurs reprises pour faire la promotion de solutions saines pour l’avenir de notre travail et de notre réseau public. Il faut absolument prendre acte de l’échec des méthodes de gestion issues du modèle privé. On ne peut tout simplement pas intervenir de la même façon auprès d’une personne qui nécessite des services qu’auprès d’un objet sur une chaîne de montage.
La FSSS-CSN a ainsi fait des propositions concrètes pour une organisation du travail qui priorise les besoins des usagers et l’amélioration des conditions de travail. Elle a aussi mis de l’avant un mode de gestion basé sur les besoins cliniques plutôt qu’uniquement sur des impératifs financiers.
Nous avons de plus intégré la question de l’autonomie professionnelle dans nos demandes en vue de la prochaine négociation du secteur public. Nous revendiquerons un engagement ferme du Conseil du trésor pour établir des protections contre l’érosion de notre autonomie professionnelle.
En misant sur l’autonomie des travailleuses et travailleurs du réseau de santé et de services sociaux, nous pouvons améliorer les services à la population. Il s’agit d’une solution concrète pour l’avenir du réseau.