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    • 19 AVR 24
    Services de garde éducatifs: l’équité réelle passe par le modèle des CPE

    Le président du rassemblement des garderies privées du Québec sortait publiquement récemment en affirmant que pour une équité réelle, il fallait financer davantage les garderies privées subventionnées.  Cette affirmation est une gifle en plein visage au principe d’équité sociale.  Les entreprises à but lucratif, qu’elles soient subventionnées ou non, visent avant tout le profit et en aucun cas l’équité sociale.  C’est plutôt notre réseau de CPE, déjà bien implanté et reconnu, mais malmené par les gouvernements successifs, qui répond réellement à ce principe.

    Rappelons que les CPE sont des organismes à but non lucratif dont la mission première est d’assurer un contexte éducatif favorable au plein développement des tous petits. Ils sont reconnus par de nombreuses études indépendantes comme étant le modèle qui offre la meilleure qualité de services.  Le réseau de CPE a été mis sur pied justement pour répondre aux principes d’égalité et d’accès pour toutes les familles.

    Les CPE possèdent également de meilleures conditions de travail. À l’opposé, certains propriétaires de garderies privées subventionnées ne respectent pas les échelles salariales du réseau des CPE établies par le ministère à la suite des négociations.  Or, on peut se questionner, est-ce que les montants reçus de la part du gouvernement sont utilisés ailleurs, et ce, sur le dos des travailleuses?

    La vraie question surtout serait de savoir pourquoi le gouvernement subventionne et privilégie des entreprises privées au détriment du réseau des CPE?  Selon sa propre loi, les CPE devraient être favorisés pour la création de nouvelles places, ce qui n’est pas appliqué dans les faits. Ce que l’on constate plutôt c’est que les embuches administratives sont beaucoup plus importantes pour l’ouverture de nouveaux CPE que pour celle de garderies privées. Ce n’est pas normal que ces dernières soient capables d’ouvrir de nouvelles places plus rapidement que les CPE. D’ailleurs, pour la période 2022-2024, le ministère de la Famille a créé 5 400 places de plus en garderies privées subventionnées qu’en CPE.

    Nous sommes d’avis que pour recevoir des subventions du ministère, les services éducatifs ne devraient avoir que la mission éducative des tous petits comme objectif premier et en aucun cas l’idée de profit. En effet, les garderies privées devraient être converties en CPE si elles veulent être subventionnées.  Après tout, l’argent des contribuables devrait servir à recevoir des services et non pas à payer des bâtiments aux propriétaires de garderie.  Ça, ça serait vraiment de l’équité pour les familles québécoises et surtout du gros bon sens.

    Il n’est donc pas surprenant, dans un modèle où l’État est responsable de toutes les dépenses et de tous les risques, que ces entreprises privées réclament toujours plus de subventions tout en maintenant la qualité des services au minimum. Une meilleure qualité rimerait alors avec des coûts très dispendieux pour les parents ou à une perte de profits. Tout comme le modèle des résidences privées pour ainé-es, dont nous avons largement vu les ratés, le modèle des garderies privées n’est pas viable ni rentable socialement. Et si le modèle n’est plus payant, elles fermeront leurs portes pour se convertir en autre chose et toutes ces places chèrement payées seront perdues. C’est une vision à courte vue. Il faut continuer de voir loin et de voir grand pour nos touts petits dans un modèle durable. La ministre en a la capacité, on lui demande donc d’agir en ce sens.

    Lucie Longchamp, vice-présidente de la Fédération de la santé et des services sociaux (FSSS-CSN) responsable des secteurs de la petite enfance

    Cet lettre d’opinion a été publié dans le Journal de Montréal:

    https://www.journaldemontreal.com/2024/04/19/services-de-garde-educatifs-lequite-reelle-passe-par-le-modele-des-cpe