C’est de plus en plus clair : il faut que les acteurs du réseau de la santé apportent des solutions pour assurer l’avenir de ce réseau. Revoir le mode de rémunération des médecins, revoir l’organisation du travail, notamment par une meilleure implication des infirmières, et revoir notre régime de médicaments! Voici la troisième d’une série de quatre solutions que nous mettons sur la table pour mieux contrôler les coûts du système de santé. Lorsqu’on compare la santé financière du réseau de la santé, du régime d’assurance médicaments et de l’industrie pharmaceutique, il y a un gagnant évident et deux grands perdants. Je ne vous demande pas de deviner lequel est le grand gagnant, je vous le dis d’emblée, il s’agit de l’industrie pharmaceutique.
En suivant un cours d’économie 101, nous apprenons qu’il y a un prix maximal qu’un consommateur est prêt à payer pour un bien ou pour un service. Au-delà de ce prix, il s’en passe. Dans tous les manuels d’économie 101, on nous dit qu’il y a pourtant des exceptions à cette règle. L’exception qu’on cite en exemple est le prix d’un médicament qui permet d’arrêter un mal persistant ou de sauver sa vie. À ce moment, il n’y a pas de prix maximal. On est alors prêt à tout. Il n’y a que la limite de ses moyens.
Les compagnies pharmaceutiques sont tout à fait au courant de cette exception à la règle. Plusieurs organisations, qu’elles soient communautaires, syndicales ou politiques, revendiquent un meilleur encadrement de ce secteur. Pensons par exemple à la campagne lancée par l’Union des consommateurs.
Pourquoi un meilleur encadrement
Pour aborder la question du coût des médicaments, il y a plusieurs exemples intéressants, mais prenons l’exemple extrême. En Afrique, depuis plusieurs années, il y a une crise sociale et médicale qui s’appelle le SIDA. Nous savons depuis près de 20 ans qu’il y a un traitement qui permet aux personnes atteintes du VIH de vivre une vie plus normale. N’eût été l’intervention acharnée de Médecins Sans Frontières, ce traitement serait toujours complètement inaccessible à la vaste majorité des Africains. Ce n’est certainement pas les compagnies pharmaceutiques qui auraient réglé la situation.
Les compagnies pharmaceutiques n’existent que pour faire un profit maximal. Non seulement c’est dans leur ADN, mais en plus la loi les y obligent. Entre le profit maximal et la valeur d’une vie, les compagnies pharmaceutiques choisissent le profit maximal. Offrir des médicaments à des Africains à prix abordable pour ces derniers aurait un impact sur le prix des médicaments ici, en Amérique,et plus particulièrement en Europe, donc un effet majeur sur leurs profits. Le choix est donc facile : les profits.
C’est pour cette raison que les règles capitalistes ne peuvent s’appliquer dans ce domaine. Entre la valeur du profit et d’une vie, le choix est facile : une vie!
Il y a deux ans, la CSN a pris position sur la question des médicaments au Québec. Voici les mesures de contrôle de coûts proposées,
- l’utilisation optimale des médicaments;
- le resserrement de la règlementation des pratiques de promotion et de marketing de l’industrie pharmaceutique;
- l’allongement de la périodicité des ordonnances;
- l’abolition de la « règle des 15 ans »;
- la mise en place d’un processus rigoureux d’évaluation des médicaments.
- la révision du choix des pays comparateurs utilisés par le Conseil d’examen du prix des médicaments brevetés (CEPMB) afin que ce groupe ne soit pas composé des pays dont les prix des médicaments sont les plus élevés.
De plus, la création d’un régime d’assurance médicaments entièrement public ressort des réflexions de la CSN, en notant l’avantage suivant :
- du point de vue de l’efficacité et de l’efficience, il est plus facile de contrôler les coûts et de mettre en œuvre des moyens pour optimiser l’utilisation des médicaments dans un régime public universel. Par ailleurs, les frais d’administration des régimes publics d’assurance ont par le passé affiché des taux moins élevés que ceux des assureurs privés.
Finalement, il y a aussi un débat important à faire sur la création d’un organisme public qui prendrait en charge l’achat des médicaments. À l’heure actuelle, l’État assume des frais cachés. Au Québec, nous consacrons plus d’argent aux médicaments que la moyenne des pays de l’OCDE et du reste du Canada.
Selon la proposition de Québec Solidaire sur la création de Pharma Québec :
Rappelons que 19,6 % des dépenses en santé sont consacrées au médicament au Québec alors que la moyenne canadienne est de 16,2 %. Il en coûte annuellement 1 027 $ par personne au Québec, comparativement à 701 $ en Colombie-Britannique et une moyenne de 912 $ dans le reste du Canada.
Pendant les dernières cinq années, Québec a investi plus de 3,4 milliards $ dans l’industrie pharmaceutique au Québec. Pendant cette même période, on a vu l’évaporation de 3 000 emplois.
La Coalition Solidarité santé comme la FSSS-CSN pensent qu’il est temps de lancer un débat sur ce dossier important. Pour assurer l’avenir du système public de la santé et des services sociaux, il est temps que le gouvernement trouve le courage de faire ce débat urgent afin de mieux financer le réseau de la santé et des services sociaux!
La semaine prochaine : les services de soutien.